
« Le grand palais de ma mère »
Mohamed El Khatib
RmnEditions/Centre Pompidou/MUCEM
ISBN 978-2 -7118-81 28-4
30 euros 
Acheter le livre en librairie
Du 13 – 29 juin 2025 Mohamed El Khatib metteur en scène, auteur, réalisateur et plasticien, a présenté dans les 3000 m2 du Grand Palais à Paris sa rétrospective « Le Grand Palais de ma mère ». Prolongeant sa recherche de plus de dix ans à la croisée du documentaire et de la fiction, l’artiste dans un format inédit a mêlé expositions, spectacles, projections, rencontres et dj-sets. Un livre publié par la Réunion des musées nationaux adapte cette aventure engagée aux contraintes de l’édition avec une mise en page très graphiquement étudiée.
Mohamed El Khatib est né en 1980 à Beaugency, dans une famille marocaine de cinq enfants, mère femme de ménage et père ouvrier dans une fonderie. Il a étudié la sociologie avant d’intégrerSciences Po et d’obtenir un DEA de géographie à Mexico. Il devient parallèlement rédacteur de reportages culturels pour l’édition mexicaine du Monde diplomatique. Il s’engage ensuite dans une thèse sur la critique théâtrale dans la presse nationale.
Son œuvre est connue pour mêler sur scène des acteurs et des personnes non professionnelles en recherche d’un dialogue authentique où le quotidien le plus banal se confronte à une esthétique exigeante, En 2014, « Moi, Corinne Dadat » narre l’histoire d’une femme de ménage rencontrée dans un workshop de théâtre à Bourges. En 2017 il fait monter sur scène 58 supporters du Racing Club de Lens pour « Stadium ». Il crée le collectif Zirlib en 2008 affirmant que l’esthétique n’est pas dépourvue de sens politique, ce qui répond à son engagement quand à l’Université de Liévin il a été artiste associé au laboratoire de sociologie SHERPA ou quand en Basse-Normandie à Caen il a organisé des camps de théâtre pour les jeunes défavorisés, pour des séjours au festival d’Avignon.


Il a multiplié rencontres, échanges et collaborations avec des spécialistes divers comme le cinéaste Alain Cavalier, l’historien Patrick Boucheron pour « Boule à neige », Israel Galvan, pour une forme de danse documentaire révélant le corps comme archive vivante, les chorégraphes Jérôme Bel ou Michel Schweizer. Avec la plasticienne Valérie Mréjen, il crée LBO, un centre d’art situé dans un Ehpad. modèle novateur reproduit ensuite à Bruxelles (Maison Gertrude) et en Avignon (Maison Paisible).

La rétrospective parisienne et ce livre témoignent de son corpus principal dédié à ses parents. Initié en 2014, au cours d’une résidence de recherche à L’L – Bruxelles (laboratoire de recherche en création contemporaine), son geste théâtral spécifique se concrétise avec « Finir en beauté », pièce sur la mort de sa mère. Dans le catalogue il fait part d’un échange avec Sophie Calle qu’il accuse d’avoir plagié son titre et qui lui répond sur l’antériorité d’une expo de Bernard Lamarche Vadel. Mohamed El Khatib élargit sa recherche sur la famille et l’héritage avec son film « Renault 12 », et le spectacle « L’Amour en Renault 12 » un road-movie initiatique entre Orléans et Tanger, puis avec « La Dispute », réunissant des enfants de huit ans qui témoignent de la séparation de leurs parents. En 2022 il publie « Mes parents », édition Les Solitaires intempestifs correspondant au spectacle éponyme.
Si d’emblée il confesse son désir de se comporter en écrivain public il poursuit son dialogue sur la création. Parmi les invités conviés au Palais , un long dialogue de 6 pages est mené avec l’écrivaine Louisa Yousfi auteure de l’essai « Rester barbare ». Toujours entre littérature et théâtre il confie un long monologue à « Leïla Shahid actrice palestinienne ».
La fin du livre rapporte les actions artistiques en Ephad, tandis qu’il ouvre la perspective à un sujet souvent tabou la sexualité des personnes âgées qu’il aborde dans le spectacle de 2024 « La vie secrète des vieux ».

Les documents visuels en couleurs vives sont nombreux souvent reproduits en pleine page les photographies son créditées Yohanne Lamoulère mais un certain nombre de documents textuels occupent le centre de la page tandis qu’un hors-texte complémentaire dans un corps plus petit ose tient dans la marge et les encadrent. Leur rôle est d’apporter une critique personnelle de l’auteur qui en complète l’historicité ou les rend plus intimes. Les textes les plus personnels adressés à la mère sont souvent doublés de leur version en arabe.
Le livre s’ouvre et se ferme sur un cahier d’images, le premier regroupe des extraits de spectacles, film ou scène, vues de workshop en Ephad, qui attestent de la diversité des pratiques du plasticien et homme de scène. Le dernier réunit les portraits identités ou photomatons de mères demandés aux proches de l’exposant pour qu’elles tiennent compagnie à sa propre mère. Réunis sur 4 pages, ils sont précédés du fac-similé de la carte d’identité Familles nombreuses de Yamna EL Khatib qui entre en dialogue avec le portrait noir et blanc d’elle photographiée jeune et souriante reproduit en couverture. Toute une vie à laquelle ce Palais rend un hommage d’une haute sensibilité.

