Maty Biayenda, Le carrousel

Maty Biayenda, Le carrousel

Commissariat Maëlle Dault
Frac Île-de-France Project Room / Le Plateau
22 rue des Alouettes, 75019 Paris
25 septembre – 2 novembre 2025
Avec des textes de Maëlle Dault et Suzanne Texier

Passé le rideau (Toile de Jouy rouge, impression sur soie), Il était une nuit… au Carrousel, Chez Madame Arthur, au Ballroom. Dans les cabarets, Paris et New York, des années 1920 aux années 1990, la nuit, peut-être, où les corps noirs et transgenres défilent, dansent et affirment la liberté d’une identité de genre ; la nuit, peut-être, où, ils et elles s’inventent des codes autres de la féminité et du regard ; où l’invisibilité, l’infériorisation et la discrimination n’ont plus leur place. Évoquant ensemble le mythe de Salmacis et d’Hermaphrodite (encre sur papier), ce À quoi rêve une jeune fille (acrylique et huile sur toile de coton) et les artistes de revues – Pepa Darena, Madiana, Coccinelle, Bambi, Angie Stardust (encre sur papier ; huile sur papier), Octavia (tissu imprimé), Milena (coton Jacquard), Jenny (tissu imprimé), Galia et Stella (tissu imprimé) –, Maty Biayenda mêle la mémoire intime et l’imaginaire collectif. Sur la toile imprimée (Toile de Jouy bleu, impression du lin), elle associe les motifs répétés de plantes et scènes coloniales avec les images de cabarets, des histoires, proches et lointaines, de représentations et de regards sur les corps, féminins et transgenres, racisés et érotisés.

Maty Biayenda, Angie Stardust, 2023, Encre sur papier, 21 x 29,7 cm © Maty Biayenda

Archives (Catalogue du dixième anniversaire des cabarets Madame Arthur et le Carrousel, 1956), dessins (Femme à l’épée…) au crayon de couleur sur papier et sur métal, encres (L’escalier…), peintures sur papier (Boucle d’oreille et Angie Stardust, Il était une nuit…), sur toile (Porte rouge) et sur bois (Le secret), impressions sur toile (JennyGalia et Stella…), jacquard, chaussures, reproduction de magazines de charme, installations questionnent le fétichisme, la notion de communauté, le regard et les codes de la séduction et de l’objectivation des corps. Mettant en correspondances multiples, les poses, les gestes, les performances des artistes et l’image théâtralisée de ses proches, Maty Biayenda interroge, dans l’interprétation de multiples références (Édouard Manet, Edgar Degas, Georgia O’Keeffe, Henri Matisse, Carrie Mae Weems… ou Paris is burning de Jennie Livingston, Bambi de Sébastien Lifshitz), en noir et blanc, en monochrome et en couleurs, la sujétion et l’invisibilité des corps noirs dans la représentation. 

Figures réelles et fictives, aux poses étudiées (Star, adhésif sur Plexiglas ; Today I won’t perform, I promise, crayon, crayon de couleur sur métal, chaussure, dessin sur papier) ou surprises aux moments plus intimes de la sororité (Le secret, acrylique sur bois), reines de beauté ou artistes transformistes, tout un monde d’apparence, de jeux d’étoffes et de transparences, de paillettes, de chaussures à talons compensés, brouille les frontières entre le passé de la domination et de l’exclusion et le présent LGBTQ+ des communautés afro- et latino-américaines, entre la réalité et le jeu des codes sociaux (dragvoguing…), les représentations plus ou moins transgressives d’invention et d’affirmation de soi, de libération du corps et du regard.

Vue de l’exposition Le carrousel de Maty Biayenda au Frac Île-de-France, Project Room du Plateau, Paris 2025 © Photo : Martin Argyroglo © Maty Biayenda

L’accrochage, regroupant ou isolant les œuvres (La fenêtre, crayon, crayon de couleur sur métal, chaussure, dessin sur papier ; Il était une nuit, acrylique et crayon sur papier) autour d’une recherche sur l’esthétisation des corps, sur l’histoire et le mythe des artistes, des défilés et spectacles, des scènes et coulisses, rythme ainsi le questionnement de Maty Biayenda et celui du visiteur sur l’identité noire, sur la légitimité de la différence, sur les formes de résistance à la discrimination. L’exposition façonne et affirme ainsi un univers de questions où se réfléchissent, à travers le jeu des stéréotypes, les traumas de l’histoire, la confrontation des expériences de genre et les ambiguïtés des vies singulières, inconnues ou icônes des identités intersectionnelles – mais aussi féminité cisgenre –, un monde des libertés de la lumière et de l’ombre, ancré dans la réalité contemporaine.