
Sur les traces du Furan
Danièle Méaux, Pierre Suchet
Éditions Filigranes
ISBN 978-2-35046-628-6
35 euros
Acheter le livre en librairie
Danièle Méaux théoricienne de la photographie, enseignante-chercheuse à l’université Jean Monnet et Pierre Suchet photographe documentaire collaborent sur un exigeant projet de géographie sociale qui suit le cours du fleuve Le Furan dont une partie du parcours demeure invisible dans sa traversée de la ville de Saint-Étienne. D’autres chercheurs des sciences humaines sont associés à cette approche pluriel qui ne néglige pas non plus l’étude des archives. Un ouvrage épais organisé dans un format à l’italienne est publié par Filigranes pour rendre compte de cette étude à long terme.
D’autres photographes contemporains se sont attachés récemment à illustrer un fleuve Bertrand Stofleth a suivi le cours du Rhône, Andrea Keen a documenté la Seine, Thibault Cuisset la Loire et Zoe Leonard le Rio Grande. Pierre Suchet mène quant à lui des enquêtes géo-photographiques sur les rivières urbaines, en France et à l’étranger. En 2022, il a conclu son travail de 10 ans sur la rivière Nièvre par une grande exposition qui a itinéré dans les principales villes du bassin Versant.
Danièle Méaux dans son approche universitaire de l’esthétique et des sciences de l’art a construit de nombreuses recherches qui structurent également le champ d’enquête et les protocoles de création de Pierre Suchet : Voyages de photographes (PUSE, 2009), Géo-photographies. Une approche renouvelée du territoire (Filigranes, 2015), Enquêtes. Nouvelles formes de photographie documentaire (Filigranes, 2019) et Photographie contemporaine & anthropocène (Filigranes, 2022).
Ensemble ils vont approcher les rapports qui se sont établis dans l’Histoire entre les hommes et la rivière et dont témoignent diverses représentations plus anciennes. Le choix d’une telle approche dialogique tente de restituer la complexité des usages quotidiens des habitants du bassin-versant et de leurs affects à l’égard du cours d’eau. Elle a aussi l’ambition d’amener le lecteur à suivre ce cheminent spatial en s’impliquant également dans cette découverte.
Le portfolio principal comporte plus de 120 pleines pages où la précision de l’enregistrement à la chambre est renforcé par un camaïeu de gris. Le cheminement de la prise de vue fait alterner espaces naturels depuis la source auxquels succèdent des vues urbaines où le fleuve reste souterrain avant der retrouver la nature vers l’embouchure. Les légendes précises des images sont collectées en fin d’ouvrage face à des vignettes, ce qui facilite une lecture plus attentive.
Deux esthétiques iconiques co-habitent dans le livre. À l’approche rigoureuse menée à la chambre photographique de grand format en noir et blanc dont Fabien Ribéry écrivait que « les images sont taciturnes, réservées, grandioses et pudiques » s’opposent les photographies couleur, au reflex numérique de Jonathan Tichit. Ce plus petit portfolio complémentaire intitulé Hybridité regroupe des images hautes en couleur qui témoignent par delà la surface des courants et mouvements aquatiques du Furan, des minéraux polychromes y flottant qui y côtoient les nombreux déchets humains.
Des reproductions de gravures anciennes, de plans dessinés, de relevés topographiques côtoient des fac-similés de journaux de la presse locale relatant les hors temps de la vie autour du fleuve. L’exigence de la démarche géo-photographique se met au service d’une lecture sensible d’un cours d’eau singulier.





Images extraites du livre de Danièle Méaux et Pierre Suchet, Sur les traces du Furan