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Les stratégies radicales des artistes du salon unRepresented 2024

Pooya Abbasian
Pooya Abbasian
Les stratégies radicales des artistes du salon unRepresented 2024
Emilia Genuardi qui s‘est fait connaitre par la mise en oeuvre en 2017 du salon a ppr oc he complète son action pour une photographie contemporaine la plus inventive : unRepresented offre les cimaises du Molière , 40, rue de Richelieu à Paris 1er, à 15 artistes sans galerie. Cette deuxième édition qui s‘est tenue du 4 au 7 avril a confirmé la pertinence et l‘excellence des choix de la directrice artistique. Emergents ou depuis plus longtemps engagés dans leur création ces artistes constituent un vivier qui témoigne de la richesse de ces pratiques actuelles.

Voir en ligne : https://www.approche.paris

L‘éditorial affirme l’archéologie du présent comme l’un des thèmes majeurs. Pour le traiter trois stratégies esthétiques sont mises en action , création d une surface bouleversée, utilisations d‘une matière appropriée et des installations en quête de réel.

1 Des surfaces transformées

Le face à face de Denis Félix et de Christophe Ollivier, tous deux autodidactes , engage un dialogue aux limites de l’abstraction qui joue de la chimie des supports. Le premier dans sa série Éclats utilise le support polaroid 4×5. Plongée dans une eau bouillante la gélatine rendue malléable entre en résonance avec des encres, des fragments d’ektas, des empreintes de doigts et l‘ajout de lumières.

Christophe Ollivier présente ici la série Les plongées Polaroid Artscratch. A partir d‘images de l’océan Atlantique il mène un processus supposant une grande réactivité dans un temps d’intervention très court sur l’image durant la montée de l‘émulsion . La sculpture rapide et précise de la chimie fait surgir de la surface formes et couleurs.

Un autre dialogue s‘établit au sein du duo Clara Chichin et Sabatina Leccia entre photographie, dessin contemporain et broderie. Prenant pour objectif une relecture des Murs à pêches de Montreuil elles en donnent une lecture stratifiée d‘une grande sensibilité Le Bruissement entre les murs.

Le portolio le plus convainquant est sans conteste celui d‘Ingrid Dorner Son titre Liminal se définit comme « ce qui atteint le seuil nécessaire pour provoquer une excitation sensorielle ». Cette sensation elle l‘obtient en plongeant ses tirages argentique dans un bain chimique qui décolle partiellement la gélatine sur laquelle elle peut intervenir. Bien que ses figures dans le paysage soient significatives, cette technique se révèle la plus sensuelle quand elle concerne des portraits ou des éléments corporels.

2 De nouvelles matières réappropriées

Nils Guadagnin dresse ses Modern Archives à partir de tirages sur feuilles d‘or et de cuivre. Ses structures représentatives de l‘activité humaine , parfois reproduites en négatif prennent une dimension fantômale. Ses tirages de petit format sont insérés dans des cadres en bois réhaussés sur les bords de mini-sculptures, boisées elle aussi, qui reprennent un élément de détail.

Les multiples portraits dérivés de Frédérique Daubal prennent leur origine dans des magazines de grande consommation. Ses multiples actions sur la surface mêlent découpage, ajouts de matières, de peinture noire et d objets donnant de l’épaisseur aux traits mais aussi de la singularité à ces pseudo-visages.

Amélie Labourdette mène son expérimentation plastique Trace d‘une occupation humaine en lien à l’archéologie. Ses prises de vues effectuées sur un site minier d’extraction de phosphate en Tunisie sont fragmentées et font l‘objet d‘un tirage argentique sur pierre. L‘ accrochage même évoque une pratique muséographique de mise au mur. Ensemble ces fragments reconstituent l‘espace d‘exploration du site.

Les Figurations anonymes de Clément Mitéran sont la résultante d une pratique mixte , ses portraits anonymes ou de gens célèbres du passé ou contemporains sont fragmentés par la mosaïque sur laquelle ils sont tirés. Cette double structure leur confère une présence fantomatique dès troublante.

3 Des installations en quête d autres réels

En choisissant de reproduire son tirage directement sur le mur le canadien Martin Desilets a vocation de Tout étreindre dans une forme minimale d installation. Chaque image finale accumule sur un seul fichier numérique la captation systématique d oeuvres présentes dans différents musées visités par l auteur. On pense à la photosynthèse mise en oeuvre par Krystof Pruskowski depuis les années 80, mais quand cet artiste ne perdait jamais le réel, le retrouvait au contraire dans une version critique non dépourvue d’humour, le tirage au mur devient une interprétation purement formaliste d un iconoclasme de bon ton.

La série Paradise de Maxime Riché sur cette ville californienne incendiée a déjà beaucoup tourné en France. Radicalisant encore sa technique du « résinotype » il expérimentait au salon un large format d‘une grande puissance colorée. En complément une installation de résidus de combustibles jouait entre impact sonore et mise en oeuvre visuelle d‘un mouvement de particules en résultant.

Sandra Matamoros développe pour ses Corps célestes une création multiple à partir des différentes occurrences d‘un cube miroir qu‘elle installe dans des paysages naturels ainsi que dans des intérieurs pour jouer des reflets et des déformations géométriques dans l’espace. Elle fait correspondre les mises en situation de la sculpture et les objets dérivés qui diffractent la vision.

La mise en espace plurielle des oeuvres de l‘artiste d‘origine iranienne Pooya Abbasian occupant sol et murs oblige notre regard à accommoder sur les multiples techniques qu’il utilise . Visages et corps provenant de multiples sources se trouvent interprétés par la photogravure , le tissage et le cyanotype sur pierre leur donnant des états de présence stratifiés . Cette lecture fictionnelle différée opère cette Organic Crisis qu’il indique en titre.

L‘installation la plus complexe , le Salon Anonyme de Véronique Bourgoin, produit à échelle 1/1 avec d‘immenses dos bleus recouvrant deux cloisons et des meubles l‘espace intime typique d‘un collectionneur. Oeuvres, objets et documents scénarisent la situation artistique dans un redoublement du réel.

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