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Pour un regard anthropologique sur l’art contemporain ?

Pour un regard anthropologique

Sarah Fauguet, Imperador, 2006
Comment sortir de la problématique, dans laquelle nous a plongé Adorno, et ou l’objet d’art est conçu dans ses contradictions : tout autant espace autonome, relevant d’une logique formelle qui lui est propre, que fait social, destiné a s’élever contre le regne des objets marchands « Comment rendre compte de l’éclatement de l’expérience, que nous partageons depuis le choc de la modernité, sans pour autant faire de la question du fragment, la tour imprenable d’une impossible totalité » C’est peut-etre en considérant d’un œil neuf les œuvres de la jeune création que l’on pourrait influer sur le cours a l’apparence irréversible de ce regard.

Les espace fictifs de l’exposition

Il nous faut nous tourner vers une des initiatives des artistes de La Générale pour comprendre comment l’objet, dans le rapport du corps qu’il induit avec le monde, peut sortir du champ du ready-made et de celui de l’esthétique des mass-média. L’exposition collective Hracany, qui a eu lieu en mars 2006, déploie tout un éventail d’objets-sculptures, se jouant ainsi de la valeur d’usage que l’on réserve habituellement a tous les choses qui nous entourent.

En le plaçant sous verre, Philippe Decrauzat, il obtient trois boomerangs en verre teinté, dont l’utilisation devient alors dangereuse, voire suicidaire, et les appose sur le mur blanc a l’instar de trois signes-virgules.

L’espace de telles œuvres, pour les quelques exemples cités, se donne a voir sous l’effet de l’agrandissement (David Cousinard et .), de l’opacité et de la surface (Sarah Fuaguet), de la multiplication (Genet Mayor), de la fragilité (Philippe Decrauzat), ou bien sous celui de l’isolement (Matthieu Mercier). Dans les hybridations qu’ils inaugurent, dans les juxtapositions et les fusions qui se mettent en place, les proportions changent, les silhouettes s’affaissent ou s’allongent mais elles gardent irrémédiablement un principe symétrique reposant sur une facture industrielle du « produit ». En cela, elles nous renvoient aux psycho objets [1] de Robert Morris.

Ce n’est pourtant pas l’objet de la consommation que ces œuvres paraissent dénoncer, comme le souligne une des quatre commissaires de cette exposition, Thu Van Tan. Au contraire, nous dit-elle, le jeu formel qui y est engagé témoigne de la mise en œuvre de fictions, de la mise en place d’un référent totalement recomposé, réinventé. Ces œuvres sont autant d’interfaces entre un monde imaginaire et un monde réel, et le corps en est le trait d’union. Mais il ne s’agit pas d’une corps abstrait, dont l’élasticité virtuelle étirerait ses limites au gré de ces formes nouvellement moulées. Il se pourrait que ce corps soit celui de nos sens, dans l’anticipation permanente qu’ils tissent avec les choses, dans le territoire qu’il dessine au sein du réel, dans les perspectives directes de notre désir.

Plus néo que le néo-géo ?

Ainsi le fossé entre le formalisme a l’apparence radicale de l’art contemporain, de son discours critique vis a vis du consumérisme, avec nos modes de vie ainsi qu’avec le caractere narratif qui se dégage de l’expérience vécue, pourrait etre réparé. Cela http://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_.... Au travers de grandes toiles aux aplats de couleurs vives, régulés dans le croisement de verticales et d’horizontales, Peter Halley y inscrit un espace symbolique, qu’il désigne d’ailleurs par ?cellules ».

« Meme si mon travail est apparemment géométrique, écrit-il, sa signification se veut l’antithese de l’art géométrique antérieur. L’art géométrique est généralement lié aux divers idéalismes de Marcel Mauss, dans Sociologie et anthropologie, pointe nos habitus, nos façons de marcher, de nager, de nous tenir debout comme autant de façonnages que notre époque et notre civilisation exercent sur notre corps. Aussi raconte-t-il avoir été étonné de la façon de marcher des jeunes françaises, imprégnées dans les années 50 de la mode américaine diffusée grêce au cinéma. Ces gestes, faculté et acquis, il les appelles les techniques du corps, assimilation d’une tradition dans l’immédiateté d’un geste qui paraît mécanique.

Et c’est peut-etre de cette mécanique dont il s’agit dans ces œuvres-ci, certes, de toutes ces micro-gestes que nous réitérons sans meme nous en rendre compte et qui, différemment assemblés, en appelleraient a une conscience accrue de soi-meme. L’objet hybride, le psycho objets [2]en dénoterait alors l’existence. Les artistes, au travers de la fabrication d’objets, seraient alors comparables a des mécaniciens de leurs propres corps, prélevant, extrayant, échantillonant, isolant, mélangeant entre eux, tous ces gestes-rouages emprunts dans la forme. Il reviendrait a celui ou celle qui les regarde de se doter des outils de l’anthropologue pour comprendre de quels reves ou de quels maux, ces objets veulent nous parler.

Et, si Adorno avait par ailleurs considéré ce couplage entre sujet et objet, dans l’expression objective de soi au travers une création mais toujours sous la nécessité d’une dialectique, c’est une totale soif de signification que nous aimerions étancher.

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++INFO++
  • Hradacany - Exposition collective
  • Une proposition d’Alice Barbaza, Yan Chateigné, David Cousinard et Thu Van Tran Wilfrid Almendra, Eric Baudard, Barina Bisch, Yannick Boulot, Valentin Carron, Nicolas Chardon, Delphine Coindet, David Cousinard, Philippe Decrauzat, Daniel Dewar et Grégory Gicquet, Sarah Fauguet, Patrice Gaillard et Claude, David Januel, Vincent Lamouroux, Genet Mayor, Damien Mazieres, Mathieu Mercier, Gyan Panchal, Julien Pelloux, Mai-Tu Perret, Caroline Pradal, Lili Reneud-Dewar, Clément Rodzielski, Olivier Severe, Thu Van Tan.
  • Exposition du 25 février au 19 mars 2006
  • La Générale 2 rue du Générale Lassalle 75019 Paris Ouvert du jeudi au dimanche de 15h a 20h et sur rendez-vous www.lagenerale.org
++Notes++

[1] Terme utilisé par Jean-Pierre Raynaud pour désigner une œuvre ou objet et pensée se construisent paralèlement comme si l’un était le symptôme de l’autre. [Wikipédia]

[2] Terme utilisé par Jean-Pierre Raynaud pour désigner une œuvre ou objet et pensée se construisent paralèlement comme si l’un était le symptôme de l’autre. [Wikipédia]

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